Parmi les cinéastes-dialecticiens, d’Eisenstein à Godard, de Murnau à Eustache, on pourrait aisément compter un cinéaste expérimental britannique dont le nom est courant et omniprésent : John Smith. Pour ce cinéaste, la dialectique s’opère évidemment entre l’image et le son, mais aussi et surtout entre la fiction et la réalité, le grand et le petit, l’exceptionnel et le trivial, ou encore l’histoire et la vie quotidienne qui, perçue comme un petit rien, disparaîtra dans l’élaboration de l’histoire officielle. Dans sa récente sérieHotel Diaries (2001-2007), John Smith oppose de façon simple et subtile ces deux choses incompatibles et entremêle son monologue balbutiant d’une réflexion sur des guerres en cours. Pour le voir, il suffit de regarder son premier épisode, Frozen War (2001), où le cinéaste, en pleine nuit dans une chambre d’hôtel, juxtapose la description des meubles et le commentaire off autour d’une image télévisée qui, s’arrêtant par accident à 1 h 41 du matin, rapporte le bombardement par les Américains et les Britanniques de l’Afghanistan. Afin d’introduire l’historicité dans son œuvre, John Smith persiste tout de même à ne pas s’éloigner de l’un des sujets auxquels il s’attache depuis ses premiers films, le quotidien, c’est-à-dire, pour parler comme Blanchot, « ce qu’il y a de plus difficile à découvrir »
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